House of Creations

Un an avant la première, les créateurs de Fanny och Alexander s’échauffent avec un opéra adapté d’un autre classique du cinéma scandinave. En octobre 2023, ils présenteront Melancholia, d’après le film culte de Lars von Trier. La première session de travail avec le Royal Swedish Orchestra nous offre déjà un aperçu de l’univers musical du compositeur Mikael Karlsson.

La distribution de Fanny och Alexander

Dans la catégorie « Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur l’opéra » : comment trouve-t-on LE chanteur adéquat à un rôle ? Notre directeur général et artistique, Peter de Caluwe, explique comment s’est déroulé le casting de la future production Fanny och Alexander.

« La période du recrutement de la distribution pour l’opéra Fanny och Alexander est à présent derrière nous. Par égard envers une des œuvres du plus grand cinéaste suédois de tous les temps, j’ai d’abord consulté le monde scandinave du chant et me suis bien sûr tourné vers Anne Sofie von Otter, elle-même Suédoise et familière de l’œuvre d’Ingmar Bergman. Elle semblait parfaite pour incarner le personnage central d’Helena Ekdahl : la grand-mère pleine d’entrain qui maintient la cohésion familiale.

Cette fascinante « mère de famille » a un amant : le juif Isak. J’ai donc demandé à Anne Sofie qui serait, pour elle, le meilleur partenaire d’opéra pour ce rôle. Elle n’a pas eu à réfléchir longtemps et a choisi Thomas Hampson. Lorsque nous les avons réunis par appel vidéo et que j’ai pu mesurer leur alchimie, une idée m’est venue. Le rôle d’Isak m’a semblé beaucoup trop épisodique et petit pour un artiste de renom comme Thomas Hampson. J’ai donc suggéré à l’équipe artistique de prendre en considération la chanteuse et le chanteur pour les rôles principaux de l’Évêque et de Justine, la gouvernante sadique. Tous deux et l’équipe ont été immédiatement enthousiastes et nous avons mutuellement entériné la décision.

Cependant, cela signifiait que nous devions partir à la recherche d’une nouvelle grand-mère ! Bettina Giese, directrice du planning artistique et de production, a suggéré le nom de Doris Soffel. J’ai tout de suite été convaincu, et lors de la visioconférence avec Doris, le compositeur et le librettiste, nous avons eu la certitude que c’était le bon choix. Doris est mariée à un diplomate suédois, parle couramment le suédois et connaît très bien les films de Bergman. Lors de notre discussion, nous avons imaginé approcher un chanteur et acteur de variété suédois pour le rôle, plus épisodique, de son amant. Le choix s’est porté sur Loa Falkman, qui a également accepté dès le premier entretien. Pour les autres rôles principaux, je me suis inspiré de l’entourage artistique du compositeur Mikael Karlsson et du librettiste Royce Vavrek, qui ont l’habitude de travailler avec des artistes américain·e·s. Deux noms ont été évoqués : Peter Tantsits, ténor, et Sasha Cooke, mezzo-soprano, qui joueront respectivement les rôles d’Oscar et d’Émilie, les parents de Fanny et Alexander.

Il ne restait plus qu’à trouver les autres membres de la famille et surtout, un an avant la première, de sélectionner les enfants qui interpréteront les deux rôles-titres. Je suis convaincu que nous pouvons trouver les voix idéales dans notre Chœur d’enfants, mais il est encore un peu trop tôt pour effectuer ce choix. Décembre 2024 est encore trop loin.

Une personne a déjà rejoint l’équipe artistique : la cheffe d’orchestre Ariane Matiakh. Une pièce aux importantes figures féminines sera donc dirigée par une femme de toute aussi grande stature. Tout s’annonce de mieux en mieux… »

IVO VAN HOVE, LE NOUVEL INTENDANT DE LA RUHRTRIENNALE

Il a été annoncé aujourd’hui que le metteur en scène de Fanny och Alexander, Ivo Van Hove, sera le nouveau directeur artistique de la Ruhrtriennale pour la période 2024-2026. Le 1^er novembre 2023, il succédera à l’actuelle directrice artistique Barbara Frey. Ivo van Hove conservera également ses fonctions de directeur à l’Internationaal Toneel Amsterdam.

Ce mardi 8 février, l’Academy of Motion Picture Arts and Sciences a annoncé les nominations en vue de la 94^e édition des Oscars du cinéma, certainement la plus célèbre et l’une des plus prestigieuses cérémonies de remise de prix consacrées au 7^e art. Il y a 38 ans, en 1984, Fanny et Alexandre se distinguait en remportant quatre statuettes dorées dans les catégories « Meilleure direction artistique », « Meilleure création de costumes », « Meilleure photographie » et « Meilleur film en langue étrangère », une distinction qui, en l’absence d’Ingmar Bergman, fut acceptée en son nom par le producteur du film et la femme du réalisateur.

Cinematograph est le nom de la maison de production et de distribution fondée par Ingmar Bergman lui-même, qui a (co)produit tous ses films, de Skammen (1968) à Fanny och Alexander (1983), et que dirige son fils Ingmar Junior depuis 2019. Une des filiales de Cinematograph, Hammars Drama Production, était responsable des divertissements culturels pour le banquet de remise des Prix Nobel de 2018 et s’est tournée, à cette occasion, vers le compositeur Mikael Karlsson. Ce qui a marqué les débuts d’une collaboration qui se poursuit aujourd’hui avec l’opéra Fanny and Alexander, projet dont Cinematograph est partenaire.

Ce n’est pas un hasard si notre adaptation de Fanny och Alexander est programmée en fin d’année. Le Noël opulent et magique avec lequel s’ouvre le film en fait, pour beaucoup, l’un des plus beaux films de Noël de tous les temps. Les préparatifs méticuleux chez les Ekdahl, le buffet grandiose, le sapin de Noël parfait, la pièce de théâtre jouée pour l’occasion, les authentiques chants et danses traditionnels (« Nu är det Jul igen »)… En Suède, l’expression « un Noël à la Fanny och Alexander » est très répandue pour de bonnes raisons.

Quel meilleur endroit pour façonner l’adaptation de Fanny och Alexander que l’île suédoise de Fårö, où Ingmar Bergman a vécu et travaillé pendant plus de 40 ans ? Depuis 2010, le Bergman Estate, fondé par sa plus jeune fille Linn Ullmann, met à disposition l’ensemble des propriétés d’Ingmar Bergman sur l’île comme lieu de résidence pour les artistes et les universitaires du monde entier. Cet été, le librettiste Royce Vavrek et le compositeur Mikael Karlsson y ont passé tout un mois. Ils ont eu la chance d’y être accueillis par Ingmar Bergman junior en personne (à gauche sur la photo) ; une partie du travail sur le livret a même été réalisée dans le bureau du grand cinéaste, qui a été conservé dans son état d’origine.

Aujourd’hui, le public de l’Opéra de Paris a salué la dernière représentation de la reprise de Play. Cette nouvelle chorégraphie d’Alexander Ekman doit en partie son succès à l’intensité de la musique composée par Mikael Karlsson, qui travaille actuellement à la partition de Fanny och Alexander.

Dans sa version longue, développée pour la télévision, Fanny och Alexander s’étend sur à peu près 5 heures. Mais si vous aviez des doutes sur la faisabilité de son adaptation sur les planches de notre maison d’opéra, sachez qu‘Ingmar Bergman avait déjà, de son vivant, écrit une version pour le théâtre, qui se joue d’ailleurs en ce moment à Paris à la Comédie Française...

Bergman est toujours resté présent en moi parce que ses films sont durs et tendres à la fois. Ils sont plein d’amertume, ils regardent la vie en face, sans fard, mais ils sont aussi humains, sensibles.

Ivo van Hove